Toutes les émotions sont positives

On a souvent tendance à classer les émotions en deux catégories : les « bonnes » et les « mauvaises ». Pourtant, cette vision est trompeuse. Toutes les émotions sont positives, dans le sens où elles ont une fonction utile. Ce qui change, c’est la tonalité de l’émotion : certaines sont agréables à vivre, d’autres désagréables, mais aucune n’est « mauvaise » en soi.

Il est essentiel de ne pas confondre émotion désagréable et émotion négative. Une émotion est positive dès lors qu’elle est adaptée à la situation, car elle nous envoie un signal, une information importante. Elle nous aide à comprendre ce que nous vivons et à nous ajuster.

Prenons l’exemple de la peur et de l’anxiété. Ces deux émotions, souvent confondues, sont pourtant distinctes.

La peur survient face à un danger immédiat et concret. Elle déclenche une cascade de réactions physiologiques : accélération du rythme cardiaque, respiration plus rapide, tension musculaire, dilatation des pupilles, libération d’adrénaline… tout cela prépare le corps à fuir ou à se battre — c’est la fameuse réponse « combat ou fuite ».

L’anxiété, quant à elle, est liée à un danger potentiel ou incertain. Elle installe un état d’hypervigilance et de tension continue. Le système nerveux sympathique reste activé plus longtemps, ce qui peut entraîner fatigue, troubles du sommeil, digestion perturbée, voire troubles de la concentration.

Ces réactions sont désagréables, certes, mais elles sont des mécanismes de protection. Elles existent pour nous alerter, nous préparer, nous pousser à l’action ou à la prudence.

Mais les émotions ne naissent pas uniquement d’un événement extérieur. Elles prennent aussi racine dans notre monde intérieur : nos pensées, nos croyances, notre histoire. Pour illustrer cela, reprenons l’exemple de la peur : un enfant qui ne sait pas qu’une situation est dangereuse ne ressentira pas de peur, tout simplement parce qu’il ne pense pas qu’il y a un danger. L’émotion dépend donc de l’interprétation que l’on fait de la situation.

Cette dimension est essentielle, car dans le cas de peurs ou d’anxiétés pathologiques, ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui posent problème, mais les croyances inadaptées qui les sous-tendent. Une personne peut être anxieuse à l’idée de parler en public non pas parce que c’est objectivement dangereux, mais parce qu’elle croit profondément qu’elle sera jugée, rejetée ou qu’elle n’a pas de valeur. Ici, l’émotion est bien réelle, mais elle s’appuie sur une perception faussée de la réalité.

Comprendre cela nous invite à questionner nos pensées et à explorer les croyances qui alimentent nos émotions. Parfois, ce travail de clarification permet de transformer une peur paralysante en une simple inquiétude passagère — ou de retrouver un calme plus ajusté à la situation.

Ce raisonnement s’applique à toutes les émotions. Prenons par exemple la culpabilité. Elle survient lorsqu’on perçoit qu’on a transgressé une valeur personnelle ou causé du tort. Son rôle est de nous inviter à réparer, à nous réajuster. Si elle est bien dosée et contextualisée, elle renforce nos liens sociaux et notre éthique intérieure.

Chaque émotion, même inconfortable, est là pour une raison. Elle a une fonction adaptative. Elle nous aide à mieux comprendre nos besoins, nos limites, nos valeurs.

Il est d’ailleurs intéressant de comparer les émotions aux organes des sens. Si nos sens — comme la vue ou l’ouïe — nous informent sur le monde extérieur, les émotions sont des capteurs de notre monde intérieur. Elles nous transmettent des messages précieux sur ce que nous vivons au plus profond de nous.

La prochaine fois qu’une émotion surgit, au lieu de la rejeter ou de la juger, posons-nous simplement cette question :

« Quelle est sa fonction ? Que cherche-t-elle à me dire ? Et sur quelle croyance repose-t-elle ? »

En adoptant ce regard, on apprend à coopérer avec nos émotions plutôt qu’à les subir.